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Kamala Harris, for the people

Kamala Harris n’est pas seulement une femme, pas seulement une femme de couleur, afro-américaine ou d’origine asiatique, ni seulement une fille d’émigrants. Elle demeurera, certes, la première toutes catégories à avoir accédé à la vice-présidence des États-Unis d’Amérique, symbole fort d’une évolution – irréversible, espérons-le – dans le statut des femmes entre autres, un marqueur historique, mais sa biographie promet qu’elle saura être beaucoup plus.

Quand Joe Biden Jr., maintenant président, l’a choisie comme partenaire dans sa course à la Maison-Blanche, certains n’ont voulu y voir qu’une manœuvre électorale : les femmes sont dans l’air du temps, le mouvement #metoo ayant clairement fait sentir leur poids politique et social ; et les Afro-américains, immigrants, enfants d’immigrants sont un électorat crucial surtout dans un scrutin serré. Ainsi, Kamala Harris, en tant que « tout-en-un » parfait, était une sorte de gros lot. Sauf qu’elle n’est pas du genre à se laisser reléguer au rang de simple accessoire.

Elle a grandi dans une famille d’universitaires de haut vol, où l’excellence faisait loi. Sa mère, chercheuse en biologie, lui a enseigné par l’exemple que les femmes autant que les hommes ont leur place au sommet. Ainsi, Kamala Harris n’a aspiré, toute sa vie, à rien d’autre qu’à ce sommet, sans se laisser non plus dévorer par l’ambition. Lucide, elle a su voir les maux dont la société américaine souffrait. Et généreuse, elle a voulu contribuer à les soulager. Aussi, son diplôme de droit en poche, au lieu de se lancer dans une carrière d’avocate au sein d’un grand cabinet, elle a choisi de travailler au service du public, « for the people ». Depuis le bureau du procureur d’un district de San Francisco, elle a gravi les échelons jusqu’au poste de procureur général de Californie. Déterminée, exigeante, tendue vers ses objectifs, elle s’est parfois égarée, et certains lui ont reproché son trop de sévérité, parfois facteur d’injustice, dans son combat contre le crime.

Depuis son élection, en 2017, au Congrès américain en tant que sénatrice pour la Californie, les occasions n’ont pas manqué de la voir à l’action. Si elle y a œuvré pour des causes essentielles, comme la médecine pour tous, les droits des enfants sans papiers et le contrôle des armes à feu, c’est son engagement dans quelques dossiers brûlants, dont celui de l’immixtion russe dans l’élection de Donald Trump, qui l’a catapultée sur le devant de la scène, faisant d’elle une figure du Parti démocrate à l’échelle nationale. Et internationale aussi.

Nommée à la commission judiciaire du Sénat, en janvier 2018, elle y a impressionné par son art du questionnement. Elle pousse les mis en examen dans leurs derniers retranchements, les empêchant de louvoyer, maintenant sa prise, implacable, quoique toujours polie, répétant ses questions jusqu’à ce qu’un silence coupable ou la vérité lui réponde. Quand elle est au micro, impossible de lui échapper. Un de ses interrogatoires lui a même valu un Twitt incendiaire de Donald Trump. Il l’y qualifiait d’ « extraordinairement méchante » ajoutant qu’il ne risquait pas de l’oublier de sitôt. La colère du Président et son antipathie pour elle ne sont pas restés sans écho puisqu’à l’automne 2018, Kamala Harris s’est trouvée – aux côtés d’Hillary Clinton, Joe Biden, George Soros et Barack Obama, entre autres – parmi les treize destinataires de lettres piégées envoyées par un complotiste et fervent supporter du chef de l’État.

Au lendemain des élections, certains aux USA pariant sur un décès, avant la fin de son mandat, du futur président Biden, voyaient déjà Harris assise dans le bureau ovale. Mais l’extrapolation est une mode que je ne suis pas. Surtout lorsqu’il s’agit d’enterrer les gens vivants. Il n’y a donc qu’à souhaiter qu’en tant que vice-présidente, elle continue à servir avec autant d’ardeur les intérêts des lésés et des mal-entendus, afin que son pays enfin mérite son titre de grandeur.